Perspectives d'avenir

La santé mentale reste un sujet sensible chez les athlètes, mais la parole se libère. Sportifs et chercheurs réfléchissent à des pistes d'attention et d'amélioration.

La famille, un soutien essentiel

La première piste d'attention est de s'assurer que l'athlète sera bien entouré au niveau personnel. La famille proche est généralement le premier soutien d’un sportif. Elle l’accompagne depuis le début de sa carrière et sera encore là après. Dans certains cas, les familles des athlètes se spécialisent dans leur accompagnement et leur permettent d'alléger un quotidien chargé.

Famille en tribune, proches à l'arrivée d'une course ou en bord de piste, leur présence fait à chaque fois le bonheur du sportif, qui ne manque pas de souligner leur rôle dans ses bonnes performances. Lors de compétitions s'étalant sur plusieurs semaines, l'athlète et son équipe gagnent à tout mettre en œuvre pour les faire venir.

S'entourer selon ses besoins

La seconde piste porte sur l'entourage professionnel qui doit convenir au sportif. Charline Van Snick a décidé de monter sa propre structure complète en France. Désabusée par l'encadrement dont elle a bénéficié en Belgique, créer une structure indépendante lui semblait nécessaire et salvateur. Elle affirme qu'il était essentiel pour elle de faire ses propres choix et que son expérience d'athlète soit reconnue.

Ses propos font écho à plusieurs principes de la théorie de l'autodétermination, développée par E. L. Deci et R. Ryan, professeurs en psychologie de l'Université de Rochester. Cette théorie repose sur l'idée que les individus sont plus motivés et performants lorsqu'ils ont la possibilité de choisir et de s'engager activement dans leurs actions, sans contrainte.

Cette théorie identifie trois besoins psychologiques fondamentaux : l'autonomie, la compétence et la relation sociale. Pour un sportif, cela signifie qu'il sera plus motivé et réussira mieux s'il se sent libre de ses choix (autonomie), compétent dans sa pratique (compétence), et soutenu socialement (relation).

En répondant à ces besoins, il est plus probable qu'il persévère dans l'entraînement et atteigne ses objectifs, avec une meilleure santé mentale.

Planifier sa vie

Selon The Inquisitive Mind, une revue de psychologie sociale, pour améliorer la santé mentale des athlètes, il faudrait tout d’abord les aider à planifier leur vie et pas seulement leurs entraînements, afin qu’ils s’y adaptent plus tôt et que leur cerveau y soit préparé. Ces stratégies d’organisation et de préparation au travail d’équipe seraient les plus efficaces.

Le sportif professionnel doit enfin apprendre à être reconnaissant envers lui-même et à se féliciter pour les efforts qu’il a fournis.

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

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JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

BW OPEN 2024, Emile Windal CC BY NC ND

BW OPEN 2024, Emile Windal CC BY NC ND

L’accompagnement psychologique en évolution 

Les ressources psychologiques mises à disposition des athlètes par les institutions ne les satisfont pas toujours. De nombreux sportifs comme Killian Sardella, joueur de football professionnel au RSC Anderlecht, décident de ne pas y faire appel et préfèrent engager une équipe spécialisée autour de leur personne.

Frédéric Gounongbe, ancien footballeur professionnel, se souvient que les psychologues des clubs sont souvent perçus comme étant associés aux coachs, ce qui n'incite pas les joueurs à se confier.

Pour répondre aux préoccupations des athlètes, et après une étude lancée en 2022, le CIO a publié un plan sur 3 ans en 2023. D’ici 2026, il s’engage à oeuvrer sur cinq points majeurs : 1) se positionner en leader dans la recherche sur la santé mentale, 2) contribuer aux études approfondies sur le sujet, 3) réduire la stigmatisation des athlètes tout en mettant en avant leur bien-être, 4) créer des environnements psychologiques sains et 5) œuvrer à l’accès au sport dans la société.

Le CIO a depuis créé un référentiel sur la santé mentale, plusieurs sites internet comme Athlete365, donnant aux athlètes un maximum de ressources médicales, et Olympisme365 pour se positionner en acteur international auprès de l’ONU. Enfin, les coachs et psychologues peuvent désormais passer un certificat et un diplôme en santé mentale dans le sport d’élite. 

Les structures sportives accordent désormais de l’importance à la santé mentale et mettent en place des cellules psychologiques de plus en plus avancées. Il y a encore quelques années, le sujet était pourtant très tabou, mais les athlètes commencent petit à petit à se confier à des professionnels.

"Je veux encourager plus de gens à parler de ce qu'ils traversent. Je l'avoue : cela m'a sauvé la vie !"

Michael Phelps

- Ancien nageur professionnel -

BW OPEN 2024, Emile Windal CC BY NC ND

BW OPEN 2024, Emile Windal CC BY NC ND

Anticiper la fin de carrière

Pouvoir continuer à travailler dans son domaine est un réel avantage pour faciliter cette reconversion. Maxime Monfort, devenu directeur sportif de son équipe cycliste, a vu son quotidien changer mais ses collègues sont restés les mêmes.

“Rester dans sa discipline de prédilection aide considérablement à sortir du sport de haut niveau”, selon Jef Brouwers. “C’est plus facile de voir les contraintes disparaître quand on continue à travailler dans un environnement auquel on est habitué. C’est pour ça que pratiquement tous les entraîneurs sont des anciens sportifs. Presque aucun sport n’y fait exception”.  


Ne rien regretter : la clé pour partir sereinement ?

Tous les sportifs n’ont cependant pas l’occasion de vivre de leur passion jusqu’à l’âge habituel de la retraite. “Lorsque tu vis tous les jours dans le sport, tu n’as presque rien à côté de ça. Les athlètes qui se reconvertissent dans un autre domaine doivent se préparer encore plus”, nous explique Jef Brouwers.

Pour ne pas avoir de remords et pour laisser derrière soi sa carrière dans le sport, l’athlète ne doit avoir qu’un seul objectif selon le psychologue. "Ne rien regretter : ça doit être la seule pensée d’un athlète à la fin de sa carrière. Évidemment, plus un athlète a éprouvé des difficultés, plus il est complexe de ne pas avoir une vision négative quand il regarde derrière lui. Mais ce n’est pas comme ça qu’il arrivera à mieux dormir la nuit.”

Des propos qui font écho à nos autres entretiens et aux quelques témoignages publics, qui illustrent parfaitement la situation dans laquelle se trouvent de nombreux athlètes. Devenir sportif professionnel est un rêve pour des millions de personnes. Le monde du sport doit changer et s'adapter aux défis de notre époque. 

Pour Damien Brevers, la clé pour permettre au milieu du sport de s'améliorer et devenir plus sain est simple : 

"Souvent, on entend souci de santé mentale, problème de santé mentale. Mais la santé mentale c'est quoi ? C'est un bien-être mental qui pousse un individu à se sentir compétent, être productif, être efficace. Il doit atteindre ce statut pour pouvoir gérer les challenges et le stress de manière optimale. Le sportif doit se sentir capable de faire face. C'est ça qu'il faut comprendre et sur ça qu'il faut travailler, pour avancer."

Paris - Roubaix 2024, Emile Windal CC BY NC ND

Paris - Roubaix 2024, Emile Windal CC BY NC ND

Ces dernières années, la santé mentale s’est imposée comme une notion indissociable du quotidien des athlètes de haut niveau. Petit à petit, l’accompagnement psychologique est en train de prendre une place prépondérante dans les différentes institutions sportives.

Toutes ces mesures prises pour améliorer le bien-être mental des sportifs sont représentatives de l’importance qu’accordent désormais les coachs et les institutions pour préserver leurs athlètes.

Cependant, de nombreuses difficultés persistent et tout le monde ne considère pas les précautions prises comme suffisantes. Des problèmes de harcèlement et d’isolement social demeurent. Certains athlètes sont toujours au bout du rouleau.

« Je pense que la société n’est pas encore prête à comprendre que l’esprit est aussi important que le corps »

Ander Mirabell

- Skeletoneur espagnol -

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND