La culture du viol

Déconstruction de nos mythes

Antonio Correggio, leda and the swan, oil on canvas, 156.2x195.3cm, Berlin, (Gemäldegalerie, Staatliche Museen), 1532

Antonio Correggio, leda and the swan, oil on canvas, 156.2x195.3cm, Berlin, (Gemäldegalerie, Staatliche Museen), 1532

Le 8 mars 2022, la Commission européenne proposait un projet de loi visant à lutter contre les violences faites aux femmes. Plusieurs sujets y étaient abordés tels que les mariages forcés, les mutilations génitales féminines, le harcèlement sexuel ou la stérilisation forcée. Un consensus a été trouvé pour tous les sujets, sauf un : la définition du viol.

Selon la Commission, tout rapport sexuel non consenti est un viol. Cependant, tout le monde n'adhère pas à cette définition. En espérant trouver un accord, un second vote avait été organisé le 14 novembre 2023. Mais la France, la Tchéquie, la Hongrie et la Pologne ont de nouveau voté contre cette partie du projet de loi. Comment se fait-il qu'on ait tellement de mal à définir le viol, ou du moins à se mettre d'accord sur une définition précise ?

De nombreux pays basent leur définition du viol sur la force ou la menace de force. Selon une récente étude d’Equality Now, “23 des 43 juridictions étudiées sur le continent américain exigent l’emploi de violences supplémentaires, de menaces ou l’exploitation de l’impuissance physique de la victime ou de son incapacité à résister en tant qu’éléments constitutifs du viol.” 

Les définitions basées sur la force et la violence contribuent aux mythes du viol et limitent directement la mesure dans laquelle ces crimes peuvent être poursuivis: une personne peut commettre un viol sans avoir recours à la violence, notamment au sein de relations de pouvoir inégale (inceste, professeur-élève...). Ces définitions laissent donc place à une impunité importante au sein de notre société et ne répondent pas aux besoins des survivant.es. Nos justices se doivent aujourd’hui de poser la question: le consentement a-t-il été donné de manière libre et volontaire? 

Pour mieux comprendre pourquoi aujourd’hui la notion de consentement n’est pas encore totalement inhérente à la définition du viol, remontons l’histoire pour y trouver les représentations originelles des relations sexuelles.

Chapitre 1: Qu'est-ce que la culture du viol ?

Sandro Botticelli, the birth of venus, tempera on canvas, 172.5x278.5cm, Florance, (Uffizi Gallery), 1485

Sandro Botticelli, the birth of venus, tempera on canvas, 172.5x278.5cm, Florance, (Uffizi Gallery), 1485

Le viol, c’est affreux, tout le monde le sait, tout le monde le dit. Pourtant, de nombreux viols restent impunis : 53 % des cas de viols rapportés sont classés sans suite selon des chiffres de l’institut Dedicated (2019). Nous faisons face aujourd’hui à une impunité institutionnelle, mais aussi sociale. La société est complice. On appelle cela la culture du viol.

La culture du viol est un concept sociologique qui définit l’ensemble des comportements et des attitudes partagés au sein d’une société donnée qui minimisent, normalisent, voire encouragent le viol.

D’après un sondage réalisé par l’institut Dedicated en 2019 en Belgique,

  • 16% des interrogés estiment que la responsabilité de la victime peut être engagée si elle est habillée de façon sexy ou provocante. 
  • 20% des hommes interrogés pensent que les femmes aiment être forcées, que la violence est sexuellement excitante pour elles.
  • ¼ des jeunes de 15 à 25 ans pensent que ne pas être sûr.e de ce que l’on veut, cela veut dire être d’accord.

Ces chiffres, choquants, illustrent parfaitement la culture du viol. Celle-ci continue d'influencer notre représentation des relations hétérosexuelles, l’idée qu’on se fait de l’amour ou encore notre rapport à l’érotisme.

Selon Victoire Tuaillon, créatrice du podcast Les Couilles sur la Table et autrice du livre du même nom, la culture du viol c’est “l’ensemble des idées reçues sur les violeurs, les victimes du viols, et les violences mêmes. Ce sont nos représentations de ce qu’est un “vrai viol”, une “vraie victime”, un “vrai violeur”.” (Tuaillon, V. (2019). Les Couilles sur la Table. Binge Audio)

Quand des faits sont rapportés et qu’ils ne correspondent pas à l’idée qu’on se fait de ce “vrai viol” - c’était sous une ruelle sombre pendant la nuit, la fille était habillée de manière provocante, le violeur était un psychopathe, un étranger qui l’a menacée au couteau… - alors on trouve des excuses au violeur, on blâme la victime ou bien on ignore le viol.  

“Pourquoi t’étais habillée comme ça”, “Mais il était saoul”, “Mais tu avais déjà couché avec lui” “C’est un artiste torturé”, “Tu le connais, il n’est pas comme ça”...

Quand on sait que, dans 94% des cas, l’agresseur est un homme et que dans 80% des cas, la victime connait son violeur, on abandonne vite l’idée qu’un violeur est mû par des pulsions « incontrôlables ». Un violeur n’est ni malade, ni incontrôlable ; il est tout à fait rationnel. Il n’est pas ce monstre imaginaire qui ne sort que la nuit, dans les ruelles sombres de la ville. Il est simplement une personne à qui on a inculqué qu’il était normal de faire passer ses propres désirs avant ceux d'une autre personne, qui est souvent son ou sa partenaire. Au fond, le violeur ce n’est pas « l’Autre », c’est souvent quelqu’un que l’on connaît et côtoie tous les jours.

Le concept de culture du viol vient de l’expression anglaise rape culture, introduite par les féministes américaines dans les années 1970. C’est la première fois que l’on établi la relation entre le viol et les fantasmes sexuels de notre culture en examinant la culture populaire et les médias. Dans les années 2010, le terme sort des cercles féministes universitaires et se démocratise suite à des mouvements comme la Slutwalk en 2011. Le rôle des études féministes ici est central : le fait de créer un terme spécifique pour un phénomène particulier permet de le faire exister. Il devient un outil pour questionner notre histoire et nos représentations.

Nos histoires, de l’Antiquité à aujourd’hui, ont créé un archétype de ce qu’est une relation hétérosexuelle, ce qu’est le désir et l’érotisme. L’Amour avec un grand A se vit d’une certaine manière parce qu’on nous l’a enseigné dans les livres, dans les peintures, les films et les chansons. Ces représentations ont donné à l’homme et à la femme un rôle social spécifique dont il est encore aujourd’hui difficile de se détacher.


Chapitre 2: Décoder les scènes de viol dans les mythes

Jean-Marc Nattier, Persus with Minerva showing the head of Medusa, oil on canvas, 113.5x146cm, Tours, (Musée des Beaux-Arts de Tours), 1718

Jean-Marc Nattier, Persus with Minerva showing the head of Medusa, oil on canvas, 113.5x146cm, Tours, (Musée des Beaux-Arts de Tours), 1718

Lors de notre recherche, nous avons eu l’occasion de discuter avec Isabelle Algrain, docteure en Histoire, arts et archéologie de l’ULB et titulaire d’un master de spécialisation en études de genre, ainsi que Jacqueline Fabre-Serris, professeure à Lille-III, spécialiste de la Rome antique et rédactrice en cheffe de la revue EuGeSta, réseau de recherche international regroupant des chercheurs qui en Europe travaillent, selon les perspectives développées dans les Gender Studies, dans les différents champs disciplinaires de l’Antiquité.

Les mythes sont le reflet de la société dans laquelle ils s'inscrivent. Si un mythe banalise le viol, c’est que la société le banalise aussi. Il est clair que la société que nous connaissons telle qu’elle était durant la Grèce Antique était profondément sexiste et construite sur un système patriarcal et esclavagiste. Il n’est donc pas étonnant de retrouver des allusions au viol, aux violences faites aux femmes de manière “banalisée” dans les mythes grecs.

Lorsque nous étudions le passé, il ne faut pas oublier le contexte qui l’entoure” rappelle Isabelle Algrain. Il est évident que nous ne pouvons pas présumer que nos ancêtres pensaient les rôles de l'homme ou de la femme comme nous.

De la même manière, la sexualité chez les Grecs n’était absolument pas la même qu’aujourd’hui. “Il n’y avait pas de case dans laquelle ranger la sexualité. Un homme pouvait avoir des relations avec son épouse, avec des servants hommes et femmes, avec de jeunes adolescents... sans que ça ne change son identité. La sexualité était vue sous forme passive ou active. L’homme pouvait avoir des relations sexuelles avec toute personne inférieure à lui. Les femmes étant, chez les Grecs, vues comme inférieures, elles n’avaient le droit que de coucher avec leur mari” explique Isabelle Algrain.

Pour comprendre l’influence de la mythologie, il faut savoir que celle-ci fut créée par l’homme et pour l’homme. Chaque histoire a pour but d’expliquer simplement les choses qu’on ne comprenait pas. Ainsi, le soleil par exemple, est anthropomorphisé et devient le dieu Hélios qui chaque matin, démarre sa course de l’est pour finir à l’ouest. Les mythes servent à éduquer, à expliquer la vie, à montrer l’exemple et parfois même à justifier les actions des citoyens.

La mythologie servait d’exemples sur lesquels ils réglaient leurs mœurs” (...) “La vie de leurs dieux étaient le reflet de leur rêve”  
(Paul Frischauer dans L'archéologie de la sexualité -1969 Éditions Stock - Chapitre 6 page 204)
Si les conteurs l’estimaient préférable, les femmes séduites et abandonnées étaient dédommagées et récompensées de leurs souffrances par les dieux, pour que les auditeurs et les auditrices fussent édifiées sur cet exemple”. 
(Paul Frischauer dans L'archéologie de la sexualité - 1969 Éditions Stock - Chapitre 6 page 203). 

Une traduction erronée des mythes ?

Comment les mythes voyagent-ils dans le temps ? Grâce aux nombreuses traductions que nous ont laissé une myriade d’auteurs à travers les siècles. Un mythe, c’est en réalité, un récit constamment réécrit.

Comme le dit Jacqueline Fabre-Serris, "Il n’y a pas une version du mythe. Le mythe est toujours réécrit en fonction des préoccupations du moment. Ils ont toujours été lus dans une culture patriarcale, jusqu’à récemment avec le mouvement féministe." Ceci dit, nous pouvons nous permettre de regarder d’un oeil nouveau la mythologie pour comprendre son influence sur notre société. Pour ce faire, plusieurs écrivaines ont déjà proposé des réécritures de mythes, permettant de mettre les femmes au centre de l’histoire. C’est le cas de Madeline Miller dans “Circé” et de Margaret Atwood dans “L’Odyssée de Pénélope”. Ces réécritures n’ont pas pour but de gommer le mythe déjà existant, mais plutôt de l’adapter à notre société du 21ème siècle, de proposer de nouvelles héroïnes pour les femmes du monde entier. Un travail titanesque qui vise aussi à montrer que le système patriarcal existe depuis bien longtemps et qu’il nous faudra beaucoup de temps pour nous en libérer.

"Traduire d’une culture à l’autre, c’est très difficile, quasiment impossible car les mots n’ont pas le même sens. Il va falloir faire un choix. La traduction est liée à l’interprétation."

“Les textes sont complexes, dans le cas d’Ovide, par exemple, il y a un vrai questionnement sur les relations hommes-femmes et sur les violences qui en découlent. Ovide est-il empathique envers les femmes ? Dénonce-t-il les violences ou prend-t-il plaisir à les décrire ? Un certain nombre de paramètres conditionnent l'interprétation qu'on se fait du récit. Certaines traductions minimisent le fait qu’il s’agit d’un viol, ou alors ils accentuent la faute de la fille en ajoutant le mot faute alors qu’il n’y est pas.”

Selon Jacqueline Fabre-Serris, Ovide évoque le consentement et dans certaines versions de ses textes, le mot crimen est associé aux nombreux rapports forcés qu'entretien Zeus avec certaines nymphes. Bizarrement, ce mot disparait dans certaines traductions.

John William Waterhouse, Circe offering the Cup to Odysseus, oil on canvas, 92x148cm, Greater Manchester, (Gallery Oldham), 1891

John William Waterhouse, Circe offering the Cup to Odysseus, oil on canvas, 92x148cm, Greater Manchester, (Gallery Oldham), 1891

Johann Heinrich Wilhelm Tischbein, Odysseus and Penelope, oil on canvas, 86.8x107.9cm, (private collection), 1802

Johann Heinrich Wilhelm Tischbein, Odysseus and Penelope, oil on canvas, 86.8x107.9cm, (private collection), 1802

La domination de l'homme sur la femme possédée, l'idée du conquérant et de la conquise

Eugène Delacroix, Leda and the Swan, Fresco, 88x67cm, Pais, (Musée National Eugène Delacroix), 1834, Photographed by H. R. Wacker

Eugène Delacroix, Leda and the Swan, Fresco, 88x67cm, Pais, (Musée National Eugène Delacroix), 1834, Photographed by H. R. Wacker

Chez nos ancêtres grecs, la virilité était souvent associée au pouvoir et à la domination. L’homme est le sexe fort, celui qui domine, qui conquiert, celui qui pénètre le territoire ennemi et le vainc. La femme en devient un objet de désir, une récompense, une proie à chasser.

Ce mythe sous-entend que le sexe est synonyme de pouvoir. Zeus est le roi des dieux, le maître incontesté de l’univers. Il est très souvent pris d’une passion dévorante pour les femmes et les hommes qu’il croise, mais personne ne peut se refuser à lui ou lui échapper. Quand Zeus donne la chance aux femmes de concevoir un demi-dieu, il est totalement impensable qu’une femme ne se soumette pas. 

Chaque nouvelle conquête est vue comme une manière d’asseoir son pouvoir, de renforcer sa virilité face à une femme qui serait conquise. Cette vision agressive du sexe, véhiculée depuis l'Antiquité, a laissé des traces dans notre vocabulaire. En effet, pour parler de nos rapports intimes, on utilise souvent le champ lexical de la guerre, de la violence et de l’humiliation. On a déjà tous entendu des phrases comme "Tu as combien de conquêtes?" ou "Oh, je suis conquise".

Notons aussi que, dans le mythe de Leda et le cygne, la relation sexuelle est vue comme un duel amoureux avec un dominant et une dominée. Zeus est d'autant plus dominant qu'il dépasse le statut d'un simple homme mortel. Cette conception du surhomme tout puissant au niveau sexuel perdure encore aujourd’hui et est problématique. Pensons à l'affaire Weinstein. Colosse tout puissant dans le monde du cinéma, il semblait évident pour Weinstein qu’en échange d’un coup de pouce dans la carrière des femmes, il méritait des faveurs sexuelles en échange.

Le désir de l'homme est plus important que celui de la femme et la double victimisation

Unknown Master (Flemish), Head of Medusa, oil on panel, 49x74cm, Firenze, (Uffizi Gallery), 16th Century

Unknown Master (Flemish), Head of Medusa, oil on panel, 49x74cm, Firenze, (Uffizi Gallery), 16th Century

La femme reste souvent blâmée en premier lieu pour une faute qui n’est pas la sienne. “Mais pourquoi tu étais habillée comme cela?”, “Pourquoi tu avais autant bu?”, “Pourquoi tu l’as séduit”... Des phrases qui résonnent dans nos têtes tant elles ont été entendues. Dans notre déconstruction de la mythologie, un récit s'applique particulièrement à ce point-ci de notre réflexion: l'histoire de Méduse et de Poséidon.

Les femmes devraient échapper aux hommes, ne pas les provoquer. Ils auraient des besoins biologiques à assouvir et pourraient être pris d’un désir fou si on se risquait à les tenter. On se rappelle tous aussi de cette interdiction de porter des bretelles ou des shorts à l’école, car cela “excite les garçons”. Comme si nous, femmes, nous devions nous ranger pour laisser les hommes respirer un peu.

Lorsqu’on blâme la victime, cela veut dire qu’on excuse le violeur. On sous entend que le crime est inconscient, "pas fait exprès".

Érotisation de la violence

Sandro Botticelli, Venus and Mars, tempera on panel, 69x173.5cm, London, (National Gallery), 1483

Sandro Botticelli, Venus and Mars, tempera on panel, 69x173.5cm, London, (National Gallery), 1483

Comme le montre le récit d'Aphrodite et Arès, l'érotisation de la violence est un mécanisme ancré dans notre société depuis bien longtemps. C'est d'ailleurs le mythe du viol le plus "populaire" encore aujourd'hui.

Le problème dans ce genre de représentations, c’est qu'il normalise la violence, la toxicité dans les relations au nom d’une "passion flamboyante". Violence et amour ne font plus qu'un.

On peut citer d’autres exemples tirés de la pop culture à succès : After ou encore Cinquante Nuances de Grey, deux histoires mettant en scène une jeune femme qui retourne inévitablement vers son bad boy en espérant le changer. Bizarrement, c’est ce qu’on attend de la femme : elle doit soigner, sauver son amoureux qui, malgré lui, "aime mal". Ces livres et leurs adaptations cinématographiques ont une énorme influence et comptabilisent des centaines des milliers de fans.

Rappelons les chiffres annoncés plus haut : 23% des jeunes pensent que les femmes aiment être forcées, que la violence est sexuellement excitante pour elles. De par l’érotisation de la violence, il y a cette idée que les relations sexuelles sont d’autant plus excitantes quand une certaine violence est impliquée. Ainsi, le refus d’une femme serait feint, tout simplement parce que cela l’excite plus. L’homme se permet alors de la forcer un peu plus, jusqu’à ce qu’elle dise oui.

Le "non" de la femme n'est pas un vrai non

James Barry, Jupiter and Juno on Mount Ida, oil on canvas, 130.2x155.4cm, Sheffield, (Graves Art Gallery), 1790-1799

James Barry, Jupiter and Juno on Mount Ida, oil on canvas, 130.2x155.4cm, Sheffield, (Graves Art Gallery), 1790-1799

L'exemple du mythe de Hera et Zeus laisse penser que si l'homme force un peu, tout finira par lui être accessible Il doit juste trouver la bonne manière de "convaincre" la femme de s'unir à lui.

L’agresseur s’excuse souvent en disant qu’il avait mal compris. En réalité, le refus a été compris, mais pas intégré ou accepté par le violeur. Si vous proposez des cookies à quelqu’un et qu’il vous répond "euh j’ai déjà beaucoup mangé", vous ne forcerez pas la personne à manger un cookie. Vous en avez directement inféré qu’il y avait un refus et vous l’acceptez sans qu’il y ait eu besoin d’un "non" explicite. Au fond, tant que la personne ne vous répond pas clairement "oui, je veux un cookie", vous n’avez aucune raison de lui en donner un. C’est exactement le même raisonnement qu’il faut appliquer pour toute relation sexuelle. Etrangement, quand il s'agit de relations sexuelles, seul un "non" explicite semble être audible.

Conclusion

Jean Honoré Fragonard, the Bolt, oil on canvas, 73x93cm, Paris, (Musée du Louvre), 1777

Jean Honoré Fragonard, the Bolt, oil on canvas, 73x93cm, Paris, (Musée du Louvre), 1777

Pour conclure, nous retiendrons donc de notre recherche que les mythes grecs étaient profondément sexistes. Ils infériorisent les femmes et minimisent toutes les violences qui ont été commises à leur égard. Des soucis de traduction et donc d'interprétation peuvent encore renforcer ce caractère.

Les mythes sont-ils donc à jeter ? Non, loin de là. Ils appartiennent à l'histoire de notre civilisation et apportent encore aujourd'hui d'importantes leçons de morale. Mais le tout, c'est de savoir comment nous voulons interpréter ces histoires. Il nous faut travailler notre esprit critique, pour choisir une grille de lecture plus objective, loin des biais patriarcaux autrefois inculqués.

"Globalement, il y a un monde où les hommes violentent les femmes qui est constamment devant nos yeux. Le moment du viol ne plaît pas, alors il est effacé.  Notre culture a banalisé la chose, l'a ignorée. Le peintre et le spectateur peuvent faire comme s'il n’y avait pas de problème. C’est une question de regard. C’est comme si on ne le voyait pas. On l’habille avec un euphémisme qui est « les amours de »." - Jacqueline Fabre-Serris

Les euphémismes n'aident pas à reconnaître, à analyser, à dénoncer. Pour espérer des évolutions, au niveau politique notamment, il est important de pouvoir bien nommer les choses.

Dans cet article, les peintures que nous avons choisies sont presque toutes des représentations des mythes que nous avons abordés. Nous vous invitons à faire l'exercice : observez bien ces images et voyez par vous-même si vous y trouvez des signes d'une romantisation du viol.

Ce travail d'analyse de notre culture est encore un vaste chantier. Quelles sont les chansons, les films, les livres actuels qui continuent de nourrir une culture du viol ? Comment mieux représenter les relations amoureuses et dénoncer les comportements déviants ? Si les mythes servaient autrefois d'exemples aux Grecs, à nous de trouver quelles histoires nous voulons choisir pour nous servir d'exemple.

John William Waterhouse, Apollo and Daphne, painting, 142.8x11.4cm, (private collection), 1908

John William Waterhouse, Apollo and Daphne, painting, 142.8x11.4cm, (private collection), 1908