Les annales du porno

Vilains films cherchent clientèle coquine

Sale, tabou, secret ou violent, le genre pornographique se cristallise autour d’un imaginaire peu reluisant. Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi. Ce désamour actuel envers le X peut s’expliquer voire même, s’inverser. 

  Dans le cinéma indépendant "Nova" à Bruxelles, on a toujours considéré la pornographie comme un genre à part entière, aussi valide que ses concurrents au box-office. Si le porno est tombé en disgrâce dans l’espace publique, il y a une explication. Il serait devenu tabou à partir du moment où il a été consommé en solo. Depuis l’apparition des VHS, chacun s’est reclu dans son intimité pour y consommer en secret ses fantasmes. Ainsi grandît le grand méchant tabou. 

De toute évidence, les films produits aujourd’hui sont, en écrasante majorité, mauvais. Ils ne racontent pas d’histoire, n’ont aucun but esthétique et ne représentent pas la réalité. Ce sont ces films-là qui sont projetés dans des institutions telles que le cinéma “Paris” à De Brouckère. Ils y sont privilégiés car ils ne coûtent pas grand chose. Selon Phil, le gérant du Nova, c’est une réaction en chaîne, un cercle vertueux ou vicieux selon les mœurs. 

La logique est implacable : puisque “le Paris” est devenu un lieu de rencontre plus qu’un lieu de culture, les gérants n’investissent plus dans des films de qualité. C'est la dégringolade de la réputation du cinéma, taxé alors de « médiocre ». Dès lors, les clients savent que son intérêt réside dans les rencontres qui peuvent s’y opérer.

Dans ces cinémas discrets, passe tout ce qui n’est pas autorisé « à la surface ». 

Ainsi, depuis l’apparition des VHS et la disparition des clients, les cinémas X se sont mués, indépendamment de leur volonté, en zone d’ombre à l’abri des lois. La prostitution et les rencontres homosexuelles s’y produisaient en toute tranquillité, quand elles étaient réprimées à "l’extérieur" .

Des initiatives apparaissent de part et d’autre pour se réapproprier ce genre cinématographique et redorer son blason. Elles consistent, par exemple, en de véritables histoires, des scénarii crédibles et un climat respectueux et inclusif, en phase avec les désirs du public. Le cinéma Nova accueillera en avril certaines séances du Brussels Porn Film Festival. Mais en 2021, les stéréotypes ont toujours la vie dure et même un cinéma ouvert d’esprit comme le "Nova" sait qu’accueillir trop de films pornographiques peut entacher sa réputation de cinéma indépendant.