Jusqu'au burn-out ?

Jusqu'où faut-il repousser les limites du corps et du mental ? Tous les athlètes ne possèdent pas les mêmes ressources pour faire face aux défis liés à leur activité. Face à la pression constante d’exceller, chaque performance devient un test, et la moindre faiblesse peut éclipser des années d’efforts. Une pression qui peut mener à l'épuisement, à une crise identitaire, voire au burn-out.

Quand les athlètes craquent

En 2021, Naomi Osaka, ancienne numéro 1 mondiale de tennis, a renoncé à Roland Garros, pourtant l’un des quatre tournois majeurs de la saison. Elle avait expliqué avoir subi plusieurs épisodes de dépression depuis 2018 et a depuis lors décidé de ne plus s’exprimer face à la presse, pour se protéger de la pression médiatique et préserver sa santé mentale.

En s’opposant ainsi frontalement face au système, face au risque d’exclusion des autres tournois, elle a permis de relancer les discussions sur la santé mentale des athlètes partout dans le monde.

Toujours en 2021, Simone Biles, considérée comme la plus grande gymnaste de tous les temps, s’est retirée des Jeux Olympiques de Tokyo juste avant les finales, alors qu’elle était donnée immense favorite. Après des « pertes de figure » (pertes de repères dans l’espace avant ses sauts), Simone Biles a plusieurs fois mentionné sa santé mentale comme raison principale de son retrait.

Starifiée depuis son plus jeune âge, elle a été soumise à une pression trop forte lors de cet épisode. Face aux critiques et aux insultes, la fédération américaine a dû intervenir, en expliquant que cette décision était nécessaire pour préserver la santé mentale de la gymnaste. Biles expliquera encore : « Je dois lutter face à mes démons. Je n’ai plus confiance. Je dois faire ce qui est bon pour moi, me concentrer sur ma santé mentale. »

Ces prises de paroles de sportives stars lors d’événements internationaux ont mis en avant le sujet du burn-out chez les athlètes.

"Le burn-out sportif est une réalité et il faut oser mettre les mots sur les choses."

Charline Van Snick

Habituellement, une carrière dans un sport de haut niveau dure entre 10 et 25 ans. Il faut y ajouter les années de pratique au niveau amateur qui précèdent. Une personne qui évolue au niveau professionnel peut ainsi être plongée dans une bulle de pression qui s’étend sur plusieurs décennies. 

Après douze années de combat et d’efforts permanents pour rester au plus haut niveau, Charline Van Snick a fini par craquer mentalement. Le manque de soutien et de considération ont eu raison de son bien-être.

Le burn-out, ou syndrome d’épuisement professionnel, est un état d’épuisement profond et de détresse lié au travail. Bien que défini depuis les années 70, le burn-out n'est pas classé et considéré comme une maladie. Il est défini comme un phénomène lié au travail, faisant partie des facteurs influençant l’état de santé ou le recours aux services de santé.

Dans le cas des athlètes, le sport façonne toute leur vie, et il est donc difficile voire impossible de trouver des moments de pause. Le stress excessif des compétitions, les pressions extérieures, l’absence d’une identité hors du sport et surtout la sensation de finir piégé dans le monde sportif sont les principales causes du burn-out sportif.

Ce burn-out sportif a été défini par Raedeke en 1997, après plusieurs études, comme un syndrome caractérisé par un épuisement physique et émotionnel durable, une diminution du sentiment d'accomplissement et une dévalorisation du sport. Il atteint le sportif même lors des phases de repos et de récupération.

Un risque accru en fin de carrière

Les symptômes de burn-out peuvent se manifester à n’importe quel moment de la carrière d’un athlète. Mais lorsque la vie sportive professionnelle s’arrête, ces symptômes ne disparaissent pas, au contraire.

Jef Brouwers, psychologue du sport, fait un parallèle entre un changement qui peut s'opérer durant la carrière d’un athlète et sa retraite. “Lorsqu’il y a un transfert qui ne fonctionne pas en football, c’est parce qu’un joueur a du mal à s’adapter à une nouvelle situation. Chaque situation demande une préparation mentale. Notre cerveau fonctionne lentement. Notre corps se déplace mais notre cerveau met du temps à s’adapter. Pour la retraite, c’est la même chose. Si tu ne te prépares pas, forcément, tu te retrouves devant un vide. Un manque de préparation, c’est la préparation d’un manque.”

Cette pression accumulée peut déboucher sur une crise identitaire profonde. Dès leur plus jeune âge, les athlètes se sont définis par leur discipline et leurs performances. Toute leur existence semble se résumer à leur rôle d’athlète, au point que lorsque l’équilibre vacille, ils se retrouvent confrontés à un vide : que reste-t-il d’eux en dehors du sport ?

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

“À la fin de ma carrière, j’étais incapable de répondre à la question : Qui es-tu vraiment ?”

Camille Lacourt

- Ancien nageur professionnel -

Une préparation mentale, mais pas seulement

Pour construire une nouvelle vie, il faut être préparé. Mais cette préparation est loin d'être uniquement mentale. De nombreux athlètes finissent leur carrière en ayant gagné de grosses sommes d'argent. Lorsque du jour au lendemain, ces rentrées d'argent disparaissent, tout le monde n'arrive pas à gérer son nouveau train de vie.

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND

JO 2024, Emile Windal CC BY NC ND